L’HISTOIRE D’UN COMBAT POUR UN JOUR FÉRIÉ

La présence de la communauté tamoule est aujourd’hui indéniable à La Réunion. Les Tamouls représentent plus d'un tiers de la population réunionnaise. Leur présence est forte dans les grandes villes ainsi que dans les endroits les plus retirés de l’île. lls luttent toujours pacifiquement pour la reconnaissance de leurs droits et de leur existence: ils continuent le combat pour l’obtention d’un jour férié.


Après l’abolition de l’esclavage en 1848, les engagés indiens sont arrivés nombreux à La Réunion pour la prospérité de l’industrie sucrière: épine dorsale de l’économie réunionnaise. Dans leurs contrats d’engagement était stipulé que les immigrés tamouls disposeraient de quatre jours fériés
en janvier. Ces jours fériés correspondaient à la célébration de la grande fête agraire de la moisson du Sud de l’Inde appelé « Pongol ». Aujourd’hui, ces jours fériés ont disparu après la tentative d’occulter l’histoire de l’engagisme à La Réunion.

Dans les années soixante, le Club Tamoul a conduit une lutte vaine pour que le 14 avril, Jour de l’An Tamoul, soit un jour de congé. Ce combat est suivi dans les années soixante-dix/quatre-vingt par la Fédération des Associations et Groupements Religieux Hindous et Culturels Tamouls de La Réunion.

De même, cela fait bientôt plus d’une décennie que l’association régionale Tamij Sangam milite pour l’obtention d’un jour férié. Demande, non seulement pour les Tamouls, mais également pour tous les Réunionnais. La communauté tamoule fait partie intégrante du peuple réunionnais.

De l’engagisme au socialisme, du Malbar au Tamoul, les descendants des immigrants souffrent toujours du mépris, de l’intolérance et de l’ignorance des autorités concernées quant au respect de leur identité, de leur culture, de leur religion et de leurs valeurs traditionnelles et morales. La revendication d’un jour férié est légitime pour de nombreuses raisons.

Les Tamouls ont été les bâtisseurs de l’île. Ils ont contribué largement à la structuration et à l’épanouissement de l’âme réunionnaise. Ils ont bravé domination, tabous, préjugés. Ils ont travaillé à la sueur de leur front dans les champs de canne et les usines. Ils ont été les acteurs des grands chantiers contribuant au développement de l’île (routes, ponts, édifices devenus aujourd’hui patrimoines historiques, l’architecture de nos belles maisons créoles, le travail des bois précieux dans l’ébénisterie viennent du Sud de l’Inde. . .).

Plus près de nous. au quotidien, les temples et les cérémonies tamoules contribuant à la beauté et à la fierté de l’île. D’autres exemples corroborent l’apport tamoul. La gastronomie du Sud de l’lnde est la base culinaire réunionnaise (les riz, grains, rougail. .. ou autres brèdes). Le plan linguistiquen’a pas échappé non plus à l’empreinte tamoule (duraï = grand chef devenu « zoreil », urugaï = plat à base de tomate devenu « rougail »... ). D’autres raisons également font penser que la demande de ce jour férié est fondamentale.

Durant cette décennie, Tamij Sangam a oeuvré pour la reconnaissan- ce de deux manifestations fortes du calendrier tamoul. Il s’agit du Varusha pirappu (Jour de l’An le 14 avril) et du Dipavali, fête de la lumière.

Cette association à caractère régional a donné toutes ses lettres de noblesses au Nouvel An Tamoul en rassemblant les différentes associations locales de toute l’île pour célébrer le Nouvel An Tamoul sur la rue de Paris à Saint Denis en avril 1990!

Cette association a également popularisé la fête de Dipavali depuis octobre 1990, fête actuellement relayée par certaines municipalités et associations locales. Aujourd’hui, chaque Réunionnais célèbre avec ferveur le 20 décembre. Demain, pourquoi ne pas envisager l’institutionnalisation du Varusha Pirappu et du Dipavali sur le calendrier pour l’ensemble des Réunionnais.

Il appartient à nos élus, trois sénateurs, cinq députés, conseillers généraux, régionaux, municipaux, de faire prendre acte à l’État de cette demande.

Issu de Tamij Sangam N°17.