PORTRAIT DE LA SEMAINE : POONOOSAWMY GEORGES

La vie de monsieur POONOOSAWMY Georges reste étroitement liée à l’histoire du temple de la rue Maréchal Leclerc dont il a vu les transformations successives, à la fois en tant que voisin de l’édifice religieux et membre actif de l’association cultuelle.


Palin Gatapadedeatchy Ajagama, grand-père maternel de Georges Poonooswamy.
Palin Gatapadedeatchy Ajagama, grand-père maternel de Georges Poonooswamy.

Son engagement s’explique par la proximité du temple de son lieu d’habitation et aussi par le fait que son grand-père paternel et son arrière grand-père maternel figurent parmi les membres fondateurs de l’association Siva-Soupramanien Souvamy de St-Denis, créée le 8 mars 1917, ainsi que l’attestent les documents publiés lors du Maha Koumbhabishégam (consécration) de l’actuel Kovil Kaljkambal.
 

UNE ENFANCE DIFFICILE

C’est dans une modeste case jouxtant l’actuel temple de la rue Maréchal Leclerc que le jeune Georges POONOOSAWMY dit Mardé voit le jour, le 28 mars 1938. Il est l’aîné d’une famille de 4 enfants dont 2 sont décédés. En 1943, son père POONOOSAWMY Antoine décède prématurément alors que lui-même est tout juste âgé de 5 ans et pendant les deux années suivantes, c’es la perte de ses deux frères qui endeuille à nouveau la petite famille déjà bien éprouvée. Il relate avec émotion comment son père, qui avait obtenu le marché de la livraison des fruits aux collectivités, le transportait dans un grand panier parmi les fruits, de la rue du Grand Chemin jusqu’au Grand Marché. Après la perte de ce marché juteux, c’est Mme POONOOSAWMY mère, née Vivienne SOUCRAMANIEN, qui pourvoit aux besoins du ménage, tirant ses seules ressources de la location de chambres. En dépit des heures sombres du malheur, il conserve de son enfance de bons souvenirs, faits, dit-il, de joies simples et d’activités saines. Il est alors scolarisé en classe primaire à St-Michel où il reçoit une instruction religieuse catholique couronnée par l’obtention d’un premier Prix, récompensant ses bonnes dispositions et le sérieux de son travail.
 

UNE CARRIERE PROFESSIONNELLE RÉUSSIE

La nécessité d’un emploi se fait vite sentir et c’est très naturellement qu’il s’oriente vers un centre d’apprentissage (CET) où il obtient, à l’âge de 18 ans, un CAP monteur- électricien. En 1958, il effectue son service militaire et en ressort avec le grade de sergent. L’année suivante, il retrouve son emploi de technicien de téléphonie automatique puis passe avec succès le concours des PTT. C’est néanmoins à la météorologie nationale qu’il a choisi en définitive de faire carrière en tant que technicien contractuel et ses lieux d’activité sont les îles Éparses, ces îles désertes de l’Océan Indien, balayées par les vents et au climat si rude. Pour améliorer les conditions de vie et de travail en ces lieux inhospitaliers, il monte une section syndicale au sein de son service et y milite activement jusqu’en 1982, date à laquelle il estime le contexte meilleur et passe le flambeau. Après une brève incursion dans le monde politique en figurant sur une liste de conseiller municipal, il découvre une nouvelle dimension du militantisme à travers la recherche identitaire et en s’engageant dans différentes associations culturelles et cultuelles tamoules. Il a entre temps pris comme épouse Hélène SEVAGAMY, originaire de Saint-Leu, et dont il aura trois enfants, deux garçons et une fille.
 

RETOUR A LA RELIGION DES ANCÊTRES

Les cérémonies religieuses qui se succèdent au Kovil au rythme du calendrier tamoul ponctuent son enfance et son adolescence. Il habite en effet, jusqu’à l’âge de 15 ans,à côté du modeste édifice religieux de l’époque, rue du Grand Chemin. Parallèlement à son parcours scolaire et religieux chez les Frères, il se familiarise peu à peu avec les rites tamouls et les nombreuses divinités du panthéon hindou. C’est à la fin de son service militaire qu’il renoue avec des parents habitant à Saint-André (Famille VEE) et bien impliqués dans le domaine religieux. Alors qu’il est convié à une cérémonie religieuse, une sorte de déclic se produit qu’il attribue à l’atavisme et, à la demande de son grand- père maternel, M. PALSAD, il commence à offrir lui-même des boucs en sacrifice, renouant ainsi avec une pratique ancestrale. Par la suite, il érige un petit autel sur un terrain agricole planté de canne et de vanille acquis à Sainte-Aune dès l’âge de 21 ans, et il y fait des offrandes aux divinités Kâli, Minisprin, Mardévirin. Cependant, sur sa parcelle de terrain jouxtant le temple de St-Denis, il construit un immeuble mais ne participe aucunement aux activités du lieu de culte. C’est en 1973 qu’on le sollicite pour faire partie du conseil d’administration et il est nommé au poste de Vice-président chargé de la culture. Il se découvre alors une véritable passion pour l’action culturelle qu’il poursuit sans relâche.


POONOOSAWMY GEORGES
POONOOSAWMY GEORGES

UN MILITANT CULTUREL ACHARNE

Quand le projet de rénovation du temple est ébauché au début des années quatre-Vingt, l’action culturelle est en plein essor avec l’enseignement du tamoul, les cours de musique et de chant, grâce notamment au travail et au dévouement de Kalaivani SHIVARAMAN. Il organise une série de spectacles à travers l’île et permet à des milliers de spectateurs de découvrir les merveilleux talents d’artistes comme Sita SANDRASEKARAN, Bala et Premila, la troupe Apsara de V. Barathi et la jeune troupe Madavi. Son premier festival de films indiens connaît aussi un grand succès auprès du public cinéphile. En 1983, il devient le responsable de la commission culture au sein de la Fédération des temples. Il y devient par la même occasion le << monsieur calendrier » et peaufine, année après année, ce qu’il considère comme le fleuron incontestable de cette association dont il revendique fièrement la paternité. Au nombre de ses réalisations figure aussi le Guide des pré- noms tamouls commencé en 1992, mais qui ne paraît sous sa forme définitive qu’à l’occasion du Maha Koumbabishégam du 6 juin 1996, les moyens financiers ayant fait défaut. En 1993, il participe activement à une campagne de sensibilisation en faveur de la crémation comme seul rite funéraire pour les hindous, un choix qui, selon lui, deviendra incontournable et s’im- posera à tous tôt ou tard. Et enfin pour marquer le 150e anniversaire de l’abolition de l’esclavage et en hommage à nos ancêtres engagés, il lance une campagne pour que ceux qui le désirent puissent remplacer leur prénom, le plus souvent imposé par les circonstances, par un prénom tamoul, symbole d’une identité retrouvée et pleinement assumée. Le sien sera, nous dit-il, Kevala et précise qu’il n’appartient pas seulement à l’hindouisme, mais aussi au jaïnisme et au bouddhisme.
 

UNE RETRAITE RESOLUMENT ACTIVE

M. Georges POONOOSAWMY, petit fils de POONOOSAWMY Marimootoo, originaire de Maurice et président fondateur du temple de St-Denis est désormais retraité de Météo France et goûte une retraite paisible dans sa maison à St Denis. Cependant paisible ne veut pas dire inactive car il voue une véritable passion au travail et à l’action ; en témoigne l’exposition de photos qu’il a organisée au temple Kâlikambal au mois d’août dernier. Bien sûr, il sait qu’il doit désormais trouver comme chaque être sa dimension spirituelle et la finalité de l’existence. C’est avec beaucoup de respect et d’humilité qu’il montre sa chambre de prière où flotte un léger parfum d’encens et où trône une photo de son Gourou (maître spirituel) entourée de nombreuses effigies de divinités dont certaines statuettes qui sont des pièces rares. Pour lui, les livres sacrés de l’hindouisme comme par exemple la Bhagavad Gîta sont la connaissance suprême et on y puise toutes les valeurs essentielles, la première d’entre elles étant l’hommage au Gourou. Quand il fait le bilan de sa propre expérience de la vie, les valeurs de références qu’il souhaite transmettre à la jeunesse sont la persévérance, le goût de l’effort personnel et le respect des autres pour combattre leur tendance actuelle au défaitisme. Il souligne avec satisfaction les nombreuses avancées constatées dans le domaine culturel qui sont le fruit d’un travail collectif réalisé de génération en génération. Pour continuer à exister, il nous faut sans cesse alimenter cette flamme et communiquer aux autres notre foi en l’avenir et notre Vision du monde.

Issue Sangam N°15. 




        

Nouveau commentaire :


Facebook
Instagram
YouTube Channel